Quitte à ce que la Belgique implose, autant que ce ne soit pas en offrant ses services à la N-VA. Capituler sans combattre et passer sous les fourches caudines des nationalistes flamands, au risque de transformer la Wallonie en un simple hinterland du port d’Anvers, il n’en est pas question pour le CDH. C’est une position qui se défend. Même si Bart De Wever a tout fait pour apparaître inoffensif, il est permis de le voir comme le grand méchant loup qui frappe à la porte de la bergerie. A quoi bon s’accrocher à la Belgique, si celle-ci, démantelée au gré des intérêts flamands, ne fait que retenir une Wallonie déliquescente dans les griffes d’une Flandre plus forte et plus égoïste. On pourrait même ajouter : plus on cède et plus on s’affaiblit et plus il sera difficile de se défendre en cas de divorce.
Quoi qu’il en soit, on ne peut pas reprocher au CDH de manquer de cohérence, et de vouloir participer au pouvoir à n’importe quel prix, puisqu’il a refusé le grand écart entre une alliance avec la N-VA au fédéral et une alliance avec les socialistes en Wallonie et à Bruxelles. (G.R.)
Bien sûr, un autre point de vue est possible. Dans une récente carte blanche publiée dans le Soir et dans le Knack, Jules Gheude dénonce l’attitude du CDH. Voici son texte, intitulé « De la vraie nature du CDH » :
Le président du CDH, Benoît Lutgen, a donc apporté une fin de non-recevoir à la note soumise par l’informateur Bart De Wever.
Cette décision – irréversible, a-t-il été précisé rue des Deux-Eglises – a été accueillie très fraîchement, c’est le moins qu’on puisse dire, du côté des éditorialistes flamands, toutes tendances confondues.
Ainsi, pour Bart Eeckhout du « Morgen », cette carotte de papier aurait même su convaincre le PS.
Dans « Het Laatste Nieuws », Jan Seghers se montre particulièrement virulent à l’égard du CDH, un petit parti de rien du tout qui rétrécit à chaque lavage. Même si ce nain grimpe sur les épaules du PS, il n’est pas aussi grand que la N-VA. Pourtant il se permet le luxe de priver la Flandre du gouvernement de centre-droit qu’elle a demandé.
Pour Bart Haeck, dans « De Tijd », le fait que le CDH oppose son veto à une politique soutenue par près de trois électeurs sur quatre en Flandre risque de créer une amertume démocratique mal vue et dangereuse à propos de la Belgique en Flandre. Le journaliste constate, en outre, que Bart De Wever ne demande presque rien pour faire entrer la N-VA au gouvernement fédéral. Ici, personne ne peut reprocher à la N-VA d’être un parti radical ou déraisonnable. Le parti ravale tout ce qui a trait à l’article 1 de ses statuts.
Son de cloche identique dans « Gazet van Antwerpen » où Lex Molenaar constate que sur base de sa note d’informateur, il n’y a rien à reprocher à De Wever.
Enfin, pour Bart Sturtewagen du « Standaard », personne ne s’était attendu à ce que le non du CDH soit aussi radical. En agissant de la sorte, le CDH s’est scotché aux socialistes francophones pour une génération.
Le constat n’est pas seulement sévère du côté flamand. Ainsi, dans « La Libre Belgique », Francis Van de Woestyne n’hésite pas à parler de jeu dangereux :
En refusant d’entamer des négociations avec la N-VA, les humanistes francophones ont donné raison à Bart De Wever et ont versé des quantités d’eau fraîche à son moulin. Désormais, la seule manière pour les Flamands de mener une politique de centre-droit en Belgique, c’est bien d’accentuer la Belgique confédérale. Il était au contraire possible de démontrer que l’on pouvait gouverner la Belgique au centre-droit dans le cadre institutionnel actuel. L’occasion est manquée. (…) Curieux : cette note n’était pas à prendre ou à laisser, c’était une base de discussion. Mais le refus net du CDH, celui de s’inscrire, même théoriquement, dans une discussion avec des partis de centre-droit, ne pourra que pousser la Flandre à se replier sur elle-même et à réclamer encore et encore de nouvelles compétences et de nouveaux pouvoirs.
En 2007 déjà, Joëlle Milquet, Madame Non, avait suscité l’ire flamande. Sept ans plus tard, son successeur à la tête du parti remet cela, alors que le CDH enregistre un score peu glorieux (9 députés sur 150 à la Chambre). Ce faisant, comme le souligne Bart Maddens, le politologue de la KUL, il a ravivé en Flandre le sentiment anti-francophone. Conséquence pour la moins paradoxale pour un parti qui, comme le PS d’ailleurs, n’a que la formule stabilité du pays à la bouche…
La Belgique, la monarchie, le PSC n’en a cure ! Tout ce qui compte pour lui, c’est d’être au pouvoir et d’obtenir des sous pour l’enseignement catholique !, m’avait un jour lâché François Perin, après m’avoir rappelé un événement où une personnalité sociale-chrétienne s’était permis de faire lanterner le Palais.
Souvenons-nous, en effet, des accords du Lambermont, du Lombard, de la Saint-Polycarpe en 2001 où l’on vit le CDH, demandeur de rien, ravaler ses principes en échange de quelques faveurs concédées à l’enseignement libre.
Pas question de toucher aux allocations familiales ou de scinder BHV sans élargissement de Bruxelles ! Joëlle Milquet avait bien joint sa voix au chœur francophone, avant d’accepter finalement cette sixième réforme de l’Etat. Une réforme de l’Etat dont le président du CD&V, Wouter Beke, s’est d’ailleurs immédiatement empressé de préciser qu’elle ne serait pas la dernière.
Ce qui me paraît caractériser les sociaux-chrétiens francophones, c’est qu’ils sont toujours en retard d’une guerre.
En 1968, ils qualifiaient le Rassemblement wallon de fossoyeur de l’Etat pour vouloir instaurer le fédéralisme. Quarante-six plus tard, ils défendent bec et ongles le schéma fédéral, alors que celui-ci est dépassé depuis que le Parlement flamand s’est prononcé, en 1999, en faveur d’un projet d’inspiration clairement confédéraliste. Un projet qui avait d’ailleurs été initié, quelques années plus tôt, par le ministre-président flamand CVP Luc Van den Brande.
En janvier dernier, « Le Soir » publiait ma « carte blanche » intitulée « CD&V et N-VA : le flirt permanent ».
La vérité, c’est que, comme, comme l’a bien fait remarquer l’ancien ministre CD&V Stefaan De Clerck, la relation entre le nationalisme et la démocratie chrétienne est profondément ancrée dans l’ADN flamand.
La vérité, c’est que le parti catholique fut la première « famille » politique à valser en l’air au lendemain du « Walen buiten » de Louvain.
Les combats d’arrière-garde du CDH évoluent dans la chimère. En proposant, comme il vient de le faire, d’instaurer une circonscription fédérale, Benoît Lutgen rame à contre-courant de l’Histoire. Pense-t-il vraiment qu’il pourrait faire un tabac en Flandre ?
Au niveau régional, le CD&V et la N-VA entendent bien poursuivre la politique de centre-droit qui a rendu la « nation » Flandre prospère et dynamique. La Wallonie, quant à elle, continuera, avec la complicité du CDH, à être gérée à gauche, en accumulant les plans de redressement qui amènent la région à connaître aujourd’hui un taux de chômage de 16% et une dette de 11,2 milliards d’euros. Le fossé entre le Nord et le Sud est là, béant. Et il ne pourra, à terme, que provoquer l’implosion du pays.
Alors que je termine ce texte, j’apprends que près d’un entrepreneur flamand sur deux envisagerait de boycotter une tripartite traditionnelle au fédéral. Et Karel Van Eetvelt, le patron d’Unizo, de préciser : On ne comprend pas le non du CDH et on craint un Di Rupo II, le cauchemar pour les patrons.
Si, selon Monsieur François Perin, tout ce qui compte pour le CDH (ex-PSC), c’est d’être au pouvoir et d’obtenir des sous pour l’enseignement catholique, Monsieur Lutgen peut sans effroi se tourner vers la France. L’enseignement privé ne semble pas se porter mal en République laïque; il existe à cet effet un article très intéressant sur le site de Wikipédia. Par confession, il existerait, en 2014, en France environ 9000 établissements catholiques accueillant 2 millions d’élèves. Pour la communauté juive, 280 écoles, collèges et lycées scolarisent environ 30 000 élèves, et une vingtaine d’établissements privés musulmans scolarisent 2 000 élèves. Pour le reste, les autorités ecclésiastiques de France se feront un plaisir de l’éclairer sur toutes les possibilités de réintégration des diocèses wallons auprès de la « Fille aînée de l’Eglise ».
On peut rêver !
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Sans compter les nombreux établissements scolaires de confession « protestantes-évangéliques » en France (il y en a plusieurs en Alsace notamment) par rapport à la Belgique (à Monceau-sur-Sambre près de Charleroi, à Marcinelle, à Colfontaine, et à Bruxelles). L’AESPEF (Association des Etablissements Scolaires Protestants Evangéliques Francophones) en répertorient 16 en France pour 5 en Belgique et 6 en Suisse également.
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Sans entrer dans une polémique de chiffres (et des croyances en leur côté « rationnel » pour justifier certaines choses d’une part et le fait que les revendications d’autonomie économiques sont d’abord venues du côté wallon d’autre part…) avec G.R. ou J. Gheude, il faut reconnaître certaines qualités au CdH.
1. Certes, en matière d’enseignement confessionnel (catholique ou autre de nos jours) François Perin avait tout à fait raison. La priorité n’est pas l’intérêt général, ni même celui de la Belgique ou encore (et surtout pas !) celui de la Wallonie. Le CdH ne vient-il pas de torpiller (en le rendant ingérable au seul profit de l’UCL à Bruxelles) le plan de réforme du paysage de l’enseignement supérieur proposé par Marcourt, séparant le Brabant wallon de la Wallonie et continuant à justifier cette ineptie de Communauté-fédération Wallonie-Bruxelles de moins en moins culturelle ?
2. Pour le reste, dans le bel article publié ce jour sous le titre : « Les psychotiques de la politique belge » (http://www.levif.be/info/actualite/belgique/les-psychotiques-de-la-politique-belge/article-4000679433772.htm), O. Mouton donne comme raison à l’attitude du CdH que : « c’est une peur panique qui a poussé Benoît Lutgen à négocier très vite avec le PS: celle de périr de mort lente dans l’opposition. Autre méfiance atavique : à l’égard du MR. Entre 1990 et 2002, les libéraux, avec le « clan Michel » à la barre, ont tenté à plusieurs reprises de dépecer le parti lors d’opérations secrètes. Le ressentiment, qui avait poussé Joëlle Milquet dans les bras d’Elio Di Rupo, reste énorme au sein du parti, et resurgit à chaque attaque frontale du CDH par les réformateurs dans les médias. » Rien à voir, là non plus avec le soucis de l’intérêt général.
3. Même un plus qu’ultra-belgicain comme l’écolo Marcel Cheron faisait remarquer que par son attitude, le CdH – parti pourtant jugé par ce dernier comme belgicain – avait renforcé la N-VA et compliqué l’avenir des relations entre les Flamands et les « francophones » (Cheron l’a dit à plusieurs reprises, il n’aime pas les Wallons). Je considère que, dans ce cadre, le refus de Ludgen est donc une très une bonne chose.
4. Dans le passé ce parti – où la règle (religieuse ?) de l’obéissance est la règle (mais en quoi est-ce différent d’ailleurs ?) – a donné à la Wallonie des hommes de grand calibre, ne pensons qu’à Jean Duvieusart. Mais pas seulement, de temps en temps, on a de bonnes surprises, comme il est rappelé dans ce billet publié dans le journal catholique bruxellois « La Libre Belgique » du 17/11/2010 : http://www.claude-thayse.net/article-faut-il-avoir-peur-du-nationalisme-wallon-57413130.html
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Je suis de la Province du Luxembourg également, et je trouverais cela assez cocasse que Benoît Lutgen (qui est originaire de Bastogne) soit celui qui aurait mis fin à la Belgique, bien malgré lui, en accentuant la séparation Nord-Sud.
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Attribuer la prospérité de la Flandre à la seule bonne gestion de centre droit, c’est ignorer les spoliations dont la Wallonie a été, est, et sera la victime tant qu’elle sera dans le cadre belge.
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En complément…
Guy Spitaels au quotidien bruxellois « Le Soir » du 10 septembre 2011:
« Elio mesure-t-il bien ce que veut le peuple flamand ? Sa stratégie est- elle de gagner du temps ? Je ne l’accable pas, mais la clarté maintenant n’est-elle pas aveuglante sur l’évolution de l’opinion en Flandre ? Et dès lors le moment n’est-il pas venu de nous demander : que voulons-nous ? Il faudrait avoir peur de perdre 15 % de richesse en cas de rupture ? Quel sens y a-t-il à proférer cette menace ? La question que nous devons nous poser reste politique : vers quoi allons-nous ?
La Belgique n’a plus de sens pour vous ?
Je ne m’investis plus affectivement depuis longtemps dans la Belgique. Je vois bien tous les avantages matériels que nous en avons. Mais cela ne suffit pas. Il faut avancer. Il faut aimer son pays pour qu’il ait une existence. Les Américains chantent leur hymne national la main sur le cœur, les Français sont fiers à mourir de leur patrie ».
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Et nous sommes fières d’être Wallons…
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Le flamingant Verhostadt flamingant comme le sont tous les Flamands a dit récemment que
veut la NVA ? La Belgique est déjà flamande. La seule ambition des politiciens wallons et
d’aboyer flamand. Il est vrai que les esclaves parlent toujours la langue de leurs maìtres et
ceci vaut aussi pour l’Union europénne qui se vautre dans la soumission á l’anglais. Que fait
la France ? Rien comme l’a dit la semaine dernière Francois Hollande évoquant la politienique
de la chaise vide initiée par le Généraml, n’est pas Charles De Gaulle qui veut. Et la présidence
italienne a jeté allemand et francais au bénéfice du globish ce sabir anglo américain.
La Wallonie francaise ? Un rêve fracassé le peuple wallon a perdu toute dignité et se
satisfait des miettes que lui concède la Flandre
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Texte illisible et donc incompréhensible.
Mais où va la Wallonie ?
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