La Flandre n’a pas dit son dernier mot

Jules Gheude sort de sa réserve et nous livre ses réflexions post-électorales sur le site du « Vif ». Comme j’ai eu l’occasion de le dire, repenser une stratégie réunioniste nécessite que l’on se mette autour d’une table sans condescendance, sur un pied d’égalité, en laissant l’égocentrisme de chacun au vestiaire. Ce n’est pas en prenant des initiatives en solitaire que nous arriverons à un résultat tangible, mais bien en travaillant en toute collégialité.

Paul D.

Jules-Gheude-en-2009-Je me suis abstenu, au cours de la récente campagne électorale, de m’exprimer. J’en retiens une chose : la volonté affichée par les responsables politiques francophones de ne pas s’embarquer dans une coalition fédérale avec les nationalistes flamands.

Le succès électoral de ces derniers a dépassé les prévisions les plus optimistes, amenant aujourd’hui Bart De Wever à se voir confier par le roi une mission d’informateur.

En politique, il ne faut jamais dire jamais. On a vu ce qu’il a en été de ces francophones « demandeurs de rien » et qui s’étaient engagés à ne pas scinder Bruxelles-Hal-Vilvorde sans élargissement de la Région bruxelloise. On ne toucherait jamais aux allocations familiales, avait affirmé haut et clair Joëlle Milquet – « Madame non »…

Nul ne peut dire, à ce stade, comment évolueront les négociations pour la formation du gouvernement fédéral et des gouvernements régionaux. On sait seulement que l’intention de Bart De Wever est de doter au plus vite la Flandre d’un gouvernement de centre-droit. Avec son ancien partenaire de cartel, le CD&V, il disposerait d’une majorité, que pourrait venir renforcer l’Open VLD.

Toute la question est de savoir comment réagiront les démocrates-chrétiens flamands. Leur président, Wouter Beke, a confessé dernièrement : « Oui, je suis flamingant. Mon biotope naturel, c’est la Flandre ». En 2007, il avait aussi déclaré : « Nous voulons une véritable confédération où chacun pourra agir comme il l’entend. Les Wallons ne tiennent à la Belgique que pour l’argent. » Qu’on se rappelle aussi les propos tenus par l’ancien ministre CD&V Stefaan De Clerck : « La relation entre le nationalisme et la démocratie chrétienne est profondément ancrée dans l’ADN flamand. »

Une chose est sûre : la 6ème réforme de l’Etat, qui doit encore être appliquée, n’apporte pas cette véritable confédération qu’appelle Wouter Beke de ses vœux. L’encre de l’accord n’était pas encore sèche qu’il s’empressait d’ailleurs de souligner que d’autres réformes devraient voir le jour.

Certes, au cours de la prochaine législature, la Constitution ne pourra être modifiée que dans des limites très strictes. Le fameux article 195, qui définit la procédure de révision de la Constitution et auquel la N-VA souhaitait toucher, ne figure pas dans la liste des articles révisables. Mais tout constitutionnaliste nous dira aussi que bien des choses peuvent être réalisées au départ des lois spéciales et que le pays n’est nullement à l’abri de gros chambardements, notamment au niveau de la sécurité sociale.

La Flandre est loin d’avoir dit son dernier mot. Souvenons-nous de cette déclaration de Karel De Gucht, en 2002, alors qu’il présidait les libéraux flamands : « La Belgique est condamnée à disparaître à terme, à s’évaporer et, en attendant, n’apporte plus aucune valeur ajoutée à la Flandre. Il est inadmissible que la Flandre paie davantage pour les soins de santé et reçoive moins en retour de la Wallonie. »

Il suffit d’avoir suivi le « duel » télévisé Magnette – De Wever du 13 mai pour réaliser le fossé infranchissable entre le Nord et le Sud. Ce sont bien deux mondes différents qui s’affrontent.

On ne peut, comme l’a fait récemment le président du FDF, Olivier Maingain, mettre en doute la légitimité démocratique de la N-VA. La façon dont un Flamand sur trois s’est exprimé ne peut être rejetée d’un revers de la main. Elle ne fait que rejoindre le préambule de la Charte que le Parlement flamand a adoptée à l’unanimité il y a deux ans et qui précise que la Flandre est bel et bien une nation.

On connaît la réflexion post-belge que je poursuis depuis 2008 et qui m’a amené à prôner, en cas de scission du pays, la formule de l’union-intégration à la France, via un statut de large autonomie pour la Wallonie (www.gewif.net).

Il ne s’agit nullement d’une réflexion fantaisiste. Comme l’a écrit feu Xavier Mabille, président du Crisp, dans l’introduction à mon livre « L’incurable mal belge sous le scalpel de François Perin » (Ed. Mols, 2007) : « Au cas où s’accomplirait l’hypothèse de la scission de l’Etat (hypothèse dont je dis depuis longtemps qu’il ne faut en aucun cas l’exclure) »…

Il ne fait aucun doute que celles et ceux qui doutent de la pérennité de la Belgique et qui sont convaincus du bien-fondé de l’intégration à la France dépassent largement le faible score enregistré par le RWF depuis sa création en 1999. C’est la raison pour laquelle j’ai dit, il y a quelques mois, que le moment me semblait venu de « repenser la stratégie réunioniste ».

Jules Gheude

5 réflexions sur « La Flandre n’a pas dit son dernier mot »

  1. Tout à fait d’accord avec M. Gheude, il faut « repenser la stratégie réunioniste »!!! Il faudrait que cette idée, ce projet pour la Wallonie, ne parle que D’UNE SEULE ET MEME VOIX!!!

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  2. Pourquoi dans ce pays seuls les FDF, MR, CDH et PS peuvent juger de ce qui est démocratique ou non ? Les Wallons demeurent des romans, malgré les diverses immigrations, et les Flamands demeurent des néerlandais malgré les diverses immigrations. An nom de quoi, les Flamands ne pourraient-ils pas voter leur auto-détermination ? En 2015, la Flandre fêtera le bicentenaire de leur rattachement aux Royaume des Pays-Bas et de Guillaume 1er des Pays-Bas le souverain commun. Tout le Parlement flamand, avant les dernières élections de mai 2014, a voté la proposition introduite par la NVA. Que faut-il de plus ? Peut-être rappeler aux Wallons qu’au 16e siècle toutes les villes de ce que nous appelons aujourd’hui la Flandre firent partie de l’Union d’Utrecht. Qu’Anvers fut la première (malheureusement éphémère) capitale de la Nation néerlandaise. Que ceux que nous appelons aujourd’hui les Flamands luttèrent aux côtés de Guillaume le Taciturne (Guillaume d’Orange si on préfère) contre les occupants espagnols…soutenus par les Wallons soucieux, uniquement, de protéger leurs privilèges. Une ténacité de cinq siècles, il faut le faire et cela devrait se respecter.

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    1. Et pendant ce temps là… En « francophonie » (« Sud du pays »), on se prépare à commémorer en grandes pompes le désatre de Waterloo…

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  3. « Ce n’est pas en prenant des initiatives en solitaire que nous arriverons à un résultat tangible, mais bien en travaillant en toute collégialité. »
    Merci Paul
    Quant au « repenser la stratégie réunioniste »… Il serait temps, en effet, de cesser de faire toujours plus de la même chose pour toujours plus de mêmes résultats.

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  4. M. Daly doit avoir le courage d’écrire sous son vrai nom : Claude Thayse (anagramme) afint que les chose soient claires pour tout le monde.

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