Directeur de l’Institut Jules Destrée, Philippe Destatte s’est longuement étendu sur la crise des « gilets jaunes » en Wallonie. Nous reprenons ici le début du texte qu’il a posté sur son blogue, auquel nous renvoyons le lecteur pour la suite de l’article.
Et pourtant, le jaune vous allait si bien…
Par Philippe Destatte, le 29 décembre 2018
Qui peut s’étonner que des gilets jaunes aient été actifs en Wallonie? D’abord, parce que l’influence de la France y est constante et puissante, et pas nécessairement depuis que les grands médias audiovisuels y sont en première ligne. On se souviendra que, toute proportion gardée, les agitations de 1789, 1830, 1848 et 1870 y ont eu des effets immédiats. On sait que les Wallons ont, depuis toujours, une belle propension à pousser la Marseillaise… Et même quand la voix de la République était portée par la BBC, en 1940, la Wallonie libre se disait au côté de la France libre. C’est la même vibration qui, lors des élections présidentielles de 2016, faisait naître de ce côté de l’Oise la Wallonie insoumise comme la Wallonie en marche. Comme naguère s’était ici aussi répandu un Front national, heureusement moins florissant et moins enraciné qu’Outre Quiévrain. Dans le développement des gilets jaunes, depuis début novembre 2018, le côté émotionnel est apparu extrêmement important. En Wallonie comme en France. Néanmoins, ce prurit semble loin d’avoir eu la même ampleur ici que là-bas. Il serait d’ailleurs imprudent de plaquer les multiples décodages de la situation française sur la réalité wallonne qui, au-delà du mimétisme, me paraît assez différente.
Ensuite, nous ne devons pas nous étonner d’une activité de gilets jaunes en Wallonie parce que cette région connaît depuis des décennies de réelles difficultés et offre un paysage socio-économique dévasté. Primo, un redressement qui tarde : ce sont les reproches qui ont été adressés aux gouvernements wallons Van Cauwenberghe, Demotte et Magnette, et qui ont provoqué, au-delà de questions majeures de gouvernance, les changements de majorité en 2017. Les observateurs sérieux et honnêtes, voire courageux, ont pu constater l’absence de mobilité dans les indicateurs essentiels depuis le début du nouveau siècle, que l’on se compare à la Flandre, à la Belgique, à l’Europe : un taux d’emploi 2017 des 20-64 ans de 63,6% qui se situe à 10 points de moins que la Flandre : celle-ci atteint déjà l’objectif Europe 2020 de 73%. Un taux de chômage wallon de 13,4%, quand il est à la moitié en Flandre (6,7%), ce qui signifie – comme le rappelait voici peu le Ministre-Président Willy Borsus – que 292.000 Wallons, pourtant sur le marché du travail, ne travaillent pas. 16% des jeunes Wallons de 18 à 24 ans ne sont ni dans un emploi, ni dans l’enseignement, ni en formation (NEETs). 26,5% de la population wallonne sont en risque de pauvreté et d’exclusion sociale. Un héritage difficile à assumer, d’autant que, derrière la rigueur et le caractère abstrait des chiffres, nous savons que se déploient des réalités sociales terribles et cruelles, des parcours individuels pénibles, du délitement social, de la déconsidération et de la souffrance. Secundo, parce que les corps intermédiaires ne sont plus capables d’expliquer ce qui se passe à la population. Peut-être doit-on invoquer la complexité croissante du monde, l’accélération des mutations, la globalisation, l’interdépendance, l’inflation croissante de l’information ? C’est un sujet difficile, car la perception de ces complexités et accélérations est une constante de l’évolution des civilisations depuis trois mille ans. La démocratisation voire la massification des études et des formations en tout genre constitue une autre réalité. Les réseaux sociaux, l’internet sont aussi de formidables moteurs d’éducation. Néanmoins, il reste des obscurités majeures – que l’on songe au prix du carburant à la pompe – que nul ne semble vouloir ou pouvoir expliquer à la population. Il semble que besoins de comprendre et savoirs enseignés sont condamnés à ne se rencontrer que très rarement. Cet exemple ouvre – tertio – sur la situation conjoncturelle stressante liée à une hausse importante du carburant au travers d’une augmentation des accises sur le prix du diesel qui a constitué un mécontentement dans certaines catégories de population, probablement les plus directement impactées : celles qui ne parviennent pas à échapper d’une manière ou d’une autre au coût direct.
Enfin, des « gilets jaunes » se sont manifestés en Wallonie parce que, comme en France, la légitimité de l’impôt pose la question de la transparence et de l’efficience de l’État, voire de son périmètre. On a entendu ce discours de la part de manifestants disant que l’État prend beaucoup d’argent aux citoyens pour fonctionner, assurer ses missions régaliennes et de protection sociale, mais aussi d’autres choses aux contours flous. Cette opacité relative, mais aussi quelques « affaires » plus ou moins récentes ouvrent la porte à pas mal de suspicion, mais aussi à quelques fantasmes. (…)
Pour lire la suite de l’article : https://phd2050.wordpress.com/2018/12/30/jaune/
Je ne suis pas un laudateur de Macron qui a commis quelques grosses maladresses et manqué de pédagogie pour expliquer des réformes qu’aucun gouvernement précédent, qu’il fût de droite ou de gauche, n’a osé entreprendre. Certes, il y a nombre d’injustices sociales, lesquelles viennent bien de loin. Je regrette néanmoins que, malgré une concurrence impitoyable sur tous les marchés, une majorité de Français se dise désormais plus attentive au pouvoir d’achat qu’à la réduction du chômage. Ah ! le consumérisme, but ultime de l’existence…
Ce qu’il faut à la France ? Une économie à la fois forte et respectueuse des exigences socio-écologiques.
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Avec Monsieur Destatte la question tient toujours du syndrome du sémaphore.
Comme le signaleur placé au poste de vigie, il tient en mains deux drapelets : un français et un belge.
Selon le discours, il agite l’un puis agite l’autre et personne ne saisit vraiment le message.
En clair, il frémit à l’idée d’avouer que les Wallons, en gilets ou en chemise, appartiennent à la branche française de l’Humanité !
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De la rencontre improbable entre « besoins de comprendre et savoirs enseignés »? Les savoirs enseignés sont connus et coulés dans le marbre des programmes scolaires rendus contraignants par les choix politiques. Sans doute peuvent-ils être contestés, mais ils sont le fruit de consensus politiques qu’il n’appartient pas à la rue de contester. Quant aux « besoins de comprendre », de quoi parle-t-on, et surtout, de qui. Je suis convaincu que les élites politiques et pédagogiques qui concoctent les programmes scolaires sont convaincus de ce « besoin », mais qu’en est-il du consommateur, de celui ou de celle contraint de se frotter aux savoirs enseignés? Le partagent-ils? Dans quelle mesure? Quelle est leur curiosité intellectuelle dans un monde qui n’encourage désormais que les investissements rentables à court terme, ce que ne seront jamais les efforts scolaires? Aussi longtemps que cette dimension, toute subjective, des besoins de comprendre sera tenue sous le boisseau, rien n’avancera qui favorisera le rencontre des besoins et des savoirs.
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Exact Monsieur Valmy ce Monsieur est assis entre chaises et ne sait
que dire. Il est évident que le peuple wallon n’a que faire de la
Belgique ce pays artificiel voulu par l’Angleterre pour se venger
de Napoleón. Malheureusement les nains politiques wallons
se satisfont des miettes du pouvoir que leur concèdent leurs
maîtres flamands, Je dis bien Maîtres ce qui explique que les
petits Wallons sont comme les esclaves contraints d’apprendre
á aboyer flamand. Il est vrai que selon les derniers sondages
la plupart des jeunes Wallons se refusent á apprendre cette
langue.
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