Carrefour et le retour de Darwin

L’article qui suit est terriblement réaliste, mais il nous appartient de choisir dans quelle société nous voulons vivre. Personnellement, je veux vivre où l’Humain gardera la primauté et où le numérique aura la place que chacun de nous voudra bien lui réserver et non l’inverse.

Quant aux Etats dont le devoir est de s’occuper de celles et ceux qui perdent leur emploi, qu’ils adoptent des lois pour imposer des sociétés comme Amazone à la mesure des nombreux emplois qu’ils détruisent et du peu d’emplois qu’ils créent. Ici, permettez-moi de penser que le gouvernement français sera bien mieux placé que le gouvernement wallon ou fédéral belge  pour mener cette politique (les élus flamands qui seront toujours majoritaires au fédéral font peu de cas de ce qui arrive à « Carrefour » en Wallonie et à Bruxelles, cette dernière enseigne étant peu implantée en région flamande).

Pour une question de grandeur d’échelle, les mariages comme « la FNAC » et « DARTY » seront également plus aisés à réaliser avec la France.

Paul D.

Chronique d’Amid Faljaoui sur le site du « Trends-tendance »

29/01/18 à 10:25 – Mise à jour à 11:33

Amid Faljaoui nous parle de la triste histoire des licenciements de Carrefour. Il nous explique pourquoi les concurrents de Carrefour, les fameuses enseignes spécialisées, sont elles-mêmes en danger face à Amazon.

Dans la triste histoire des licenciements de Carrefour, Myriam Delmée, la responsable du syndicat Setca pour le secteur de la distribution a tout dit en quelques mots à mes confrères du « Soir ». À la question de savoir s’il y a trop de supermarchés, elle répond avec beaucoup de franchise: « J’en suis persuadée. Le marché est saturé, et on va nécessairement aller vers d’autres restructurations lourdes dans d’autres enseignes. » Voilà, tout est dit. Le reste de la discussion est important, mais il ne faut pas se leurrer, ce n’est qu’une lutte syndicale pour obtenir les meilleures conditions de départ.

Souvenez-vous d’ING en 2017, et plus globalement dans ce secteur bancaire, les licenciements et autres départs ont été également motivés par la concurrence d’Internet.

Bien sûr, les FinTechs ou Amazon ne sont pas les seuls facteurs expliquant les difficultés du secteur bancaire ou du secteur de la distribution, mais la révolution numérique a accéléré la décision de se séparer de certains collaborateurs. Pouvait-on procéder autrement ? La question est hélas oiseuse, car aujourd’hui, un patron n’a malheureusement plus beaucoup de temps devant lui pour faire face aux changements. Auparavant, lorsqu’une nouveauté technologique arrivait sur le marché, la direction avait le temps de l’ausculter et de l’adopter. Actuellement, les innovations sur le Net vont trop vite pour laisser un patron choisir son temps de réaction. Il doit réagir vite, et fort, exactement comme le patron de Carrefour l’a fait six mois après sa nomination.

Si vous en doutez, Bill Gross, le fondateur d’un incubateur américain a calculé le nombre d’années qu’il fallait pour qu’un produit atteigne 50 millions de consommateurs. Le résultat est édifiant : l’avion a mis par exemple 68 ans avant d’avoir 50 millions de passagers, la voiture 62 ans, le téléphone 50 ans, la télévision 22 ans, et les distributeurs de billets 18 ans ! En revanche, You Tube s’est imposé en 4 ans pour avoir 50 millions d’usagers, Facebook en 3 ans seulement, Twitter en deux ans, et un jeu comme Pokémon Go s’est imposé en à peine 19 jours. Bref, pour atteindre 50 millions de consommateurs, nous sommes passés d’une durée de 68 ans à… 19 jours !

Dans le cas de Carrefour, la concurrence vient évidemment d’Amazon ou d’autres « pure players » comme Zalando, mais elle vient aussi des grandes surfaces spécialisées : les unes dans l’électronique, comme Media Markt, les autres dans le bricolage, le textile pour enfant, le sport comme Décathlon, les jouets ou encore l’ameublement. Mais toutes ces enseignes spécialisées sont elles-mêmes sous pression et sont parfois menacées de mort. Même un géant comme Decathlon doit faire face à la concurrence d’un Amazon. Je dirais même que le danger est encore plus grand pour les distributeurs qui n’ont pas leur propre marque et se contentent de distribuer des produits qu’on trouve à un clic de distance. C’est la raison pour laquelle la FNAC s’est mariée avec DARTY en 2017 par exemple. D’abord pour avoir plus de force pour négocier ses achats face à ses fournisseurs, ensuite pour créer des synergies et donc des économies d’échelle. Et toutes ces économies doivent servir à dégager de l’argent pour investir dans le numérique, sans quoi l’ogre Amazon vous avale tout cru.

Ironie du sort : le jour même du plan de restructuration de Carrefour, Amazon annonçait l’ouverture de son supermarché sans caisse

Voilà pourquoi, dans le secteur du jouet, des meubles, du jardinage ou du bricolage, les années à venir verront de nombreux mariages. Et les enseignes qui voudront rester célibataires auront les pires difficultés pour survivre. Quant à Carrefour et les autres distributeurs, leur avenir est déjà challengé par Amazon et son homologue chinois JD. La raison ? Tous les deux sont déjà en train de tester des supérettes sans caissières ! Grâce à l’intelligence artificielle, grâce à la reconnaissance faciale, et grâce aux données de votre smartphone, vous pourrez vous servir dans les rayons à votre guise et partir sans passer par une caisse. Arrivé chez vous, un email avec la facture de vos achats vous attendra. Utopie ? Nenni,  Amazon le fait déjà dans un supermarché à Seattle.

Ironie du sort, la direction d’Amazon a annoncé ce concept Amazon Go le jour même du plan de restructuration de Carrefour à Paris. C’est plus qu’un symbole, c’est un monde qui se meurt avec fracas pour faire place à un autre. Et sans doute ne faudra-t-il pas attendre 68 ans pour voir des supermarchés sans caissières fleurir partout.

Le banquier d’affaires Michel Cicurel a raison de dire que la course numérique s’accélère : c’est une urgence de fortifier les coureurs et de ne pas les freiner mais à condition également de soigner les blessés. Et ça, c’est le rôle primordial de l’Etat. Pour éviter que la révolution numérique ne soit considérée comme le retour de Darwin et ne provoque des révolutions.

4 réflexions sur « Carrefour et le retour de Darwin »

  1. Après le « politiquement correct », voici donc l’ « économiquement correct ».
    « Fortifier les coureurs », « ne pas les freiner », tel est le mot d’ordre que l’on souhaiterait partagé. La fin pour justifier tous les moyens, en quelque sorte, celle du profit à n’importe quel prix. Après tout, c’était déjà, avec le chantage à l’emploi, le discours des caciques prétendument socialistes de Publifin.
    Mais une chose différencie ces gens-là, ces parvenus. Avec les filiales de Publifin, on n’a guère le choix (les intercommunales!), mais avec Voo, avec l’Avenir…!?! Avec Amazon, avec Carrefour, avec les banques, on peut dire non, avec Alain (« Penser, c’est dire non ») et refuser de commander en ligne et devenir le bon petit soldat d’un système qui a perdu son âme. Dangereux? en quoi et pour qui?

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  2. Excellent article dont le propos tient à notre volonté d’appartenir à un Etat qui nous rassemble et nous ressemble: l’Etat français.
    Le rôle d’un Etat étant aussi d’offrir les conditions nécessaires et suffisantes pour :  » fortifier les coureurs et de ne pas les freiner mais à condition également de soigner les blessés « . Cela n’impose pas nécessairement à l’Etat de financer les « coureurs ».
     » C’est le rôle primordial de l’Etat. Pour éviter que la révolution numérique ne soit considérée comme le retour de Darwin et ne provoque des révolutions ».
    Mais, en Belgique, la notion d’Etat n’existe que depuis Napoléon 1er (1804) et sous Guillaume 1er, Roi des Pays-Bas, jusqu’en 1830.
    Par la suite, cette notion d’Etat sera pervertie, détournée, phagocytée par les « familles issues de l’Ancien Régime » camouflées sous des « peaux d’ânes », des appellations contemporaines de « partis politiques ». Sans oublier le clivage Flamands / Wallons.
    Effectivement, deux observations à formuler, la première porte sur le quasi désintérêt de la Flandre ( nb: les emplois perdus chez carrefour seront rapidement remplacés dans d’autres enseignes, paroles du gouvernement de Flandre ! ) et  » le silence des agneaux  » du côté wallon ( bien sûr, n’oublions pas les jérémiades et les menaces de grèves de la FGTB).
    Quant au Premier ministre Charles Michel, en dehors de paroles de circonstances, il n’ a même pas pensé présenter des propositions concrètes pour éviter la fermeture à terme du complexe commercial liégeois dépendant de la présence d’un hyper Carrefour condamné.
    En fait, ce Premier ministre ne pense plus à la Wallonie, il pense à sa carrière et au service du plus fort dans ce royaume tronqué.
    N’oublions pas, que sans sa mise sous pression par des représentants politiques du Brabant wallon, Charles Michel ne levait pas le petit doigt pour la relance du RER, préférant condamner cette province au désert économique (ndlr: bien que si toutes liaisons avec Bruxelles pouvaient être supprimées, cela abrégerait l’agonie de la Belgique).

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  3. Il ne s’agit pas d’encenser le pragmatisme flamand et la réactivité des dirigeants de Flandre, seulement il semble que les dirigeants publics et les syndicalistes wallons ( excepté les hurlements d’horreur) ne réagissent jamais dans une optique pragmatique.
    Carrefour ne souhaite plus d’hypermarchés, d’accord.
    Seulement, la suppression de l’hypermarché de Belle-Ile (Liège) va engendrer une débâcle dans le centre commercial où il se trouve.
    Qui, à ce jour, du gouvernement régional, de la province de Liège (socialiste) et de la ville de Liège (socialiste) a réagi quant à ce drame prochain prévisible ? Personne !
    Personne n’a réagi pour convenir qu’une réunion d’urgence avec la direction de Carrefour s’imposait afin de transformer l’hypermarché en supermarché ou en simple « marché », de façon à conserver une clientèle de base qui profite aux autres enseignes situées dans le centre commercial.
    Là, navré, mais un Flamand aurait agit en responsable pragmatique et proposé une solution de remplacement.
    Dans le monde des affaires, il y a souvent (pas toujours) moyen de trouver des solutions même si cela implique des débours publics d’autant qu’il ne s’agit pas, ici, d’un canard boiteux.

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