Cette semaine dans ‘t Pallieterke

Pour la rubrique « Op de praatstoel » du journal flamand « ‘t Pallieterke », Frans Crols, l’ancien rédacteur en chef de l’hebdomadaire « Trends-Tendances » a choisi d’interroger Jules Gheude sur sa vision de l’avenir de la Belgique.

Jules Gheude« La Wallonie doit rejoindre la République française »

Jules Gheude voit approcher la fin de la Belgique de manière irréversible. Son espoir, pour la Wallonie, est une réunion avec le voisin méridional, la France. Et cela avec un statut particulier comme les régions de Corse et d’Alsace-Moselle. Cette réunion sur mesure permet d’ancrer plus solidement le rattachisme dans la réalité.

Jules Gheude (68 ans) n’a pas une crinière sauvage ni des allures révolutionnaires, mais plutôt le rayonnement d’un prêtre. Entre ses milliers de livres apparaît le buste de Richard Wagner, une passion musicale qu’il partage avec son ami, mentor et testateur politique François Perin (décédé en 2013). Avec un sourire, il se souvient : « François Perin et moi aurions aimé assister au Festival de Bayreuth. Mais nous n’avons jamais réussi à obtenir des places. »

Jules Gheude reste une exception : un Wallon qui jongle avec plaisir avec le néerlandais, tant au niveau de la conversation que de l’écriture. Avec son épouse italienne, il réside dans une villa blanche sur les hauteurs de Namur, ville qui connut jadis un rebelle : le graveur et peintre Félicien Rops et son œuvre érotique (que l’on commémore en ce moment par le biais d’un événement en duo avec Jan Fabre, son pendant contemporain).

Jules Gheude vient de publier son onzième livre : « François Perin – Une Plume / L’œuvre écrite » et cette passion pour l’écriture lui procure un tremplin  dans les médias francophones. « Le combat que je mène depuis des années pour l’intégration de la Wallonie en France ne m’a pas relégué intellectuellement dans la marge. Je n’ai pas à me plaindre de l’attitude des médias. Ils me donnent régulièrement l’occasion de m’exprimer. »

Jules Gheude publie des textes sur le site de Knack et il fut récemment l’orateur principal d’une journée de réflexion du Mouvement Populaire Flamand à Beveren. Les participants furent ravis par l’élégant et néanmoins radical « réunioniste », ainsi qu’il aime se qualifier aujourd’hui : « Dans le dialogue avec des amis français, les choses ont pris une tournure plus concrète quant à la manière dont la Wallonie pourrait se réunir à la France. C’est ce que nous symbolisons aujourd’hui avec la formule ‘union-intégration’. Nous y allons en douceur, selon un scénario sur mesure, un statut particulier. La Constitution française est suffisamment souple pour accorder de tels statuts : c’est le cas avec la plupart des collectivités d’outre-mer, ainsi qu’avec la Corse ou l’Alsace-Moselle. La Wallonie pourrait ainsi conserver sa spécificité. L’ex-droit fédéral, à quelques exceptions près, serait également conservé et placé sous la responsabilité du législateur français, qui reprendrait le rôle du législateur belge. Et notre système de sécurité sociale serait adossé au système français. »

Bien qu’il parle avec passion des liens naturels (langue et culture) avec la France – il a passé une grande partie de sa jeunesse à Paris, où son père travaillait pour l’agence commerciale de la SNCB -, Jules Gheude n’a jamais idéalisé les Etats-Nations : « Lorsqu’on plonge dans l’Histoire, on constate que les Etats se sont formés au travers des guerres et des mariages princiers, sans la moindre intervention des peuples. Marguerite Yourcenar a fort bien décrit cela : Les princes s’arrachent les pays comme les ivrognes à la terrasse se disputent les plats. Avec le temps, les Etats sont devenus des nations. Mais avec la philosophie démocratique actuelle, les peuples peuvent désormais décider de leur avenir. Les Etats ne sont pas immuables. Voyez ce qui se passe avec la Catalogne, l’Ecosse ou la Flandre, avec un sentiment identitaire fortement présent. Si demain le Parlement flamand devait proclamer l’indépendance de la Flandre, on ne pourrait pas s’en offusquer. Ce parlement tire en effet sa légitimité du suffrage universel.»

‘t Pallieterke : Pourquoi optez-vous pour la réunion de la Wallonie à la France ?

Jules Gheude : « Jour après jour, je vois le démantèlement de la Belgique progresser comme un processus irréversible. Si un peuple ou une nation belge n’est jamais parvenu à germer, en revanche, il y a bien une nation flamande. Cela figure d’ailleurs expressément dans le « Manifeste pour la Flandre », que le Parlement flamand a adopté en 2012. Si la Belgique se scinde, je vois trois scénarios pour la Wallonie : 1° une Wallonie indépendante ; 2° la réunion de la Wallonie et de Bruxelles en un Etat, le fameux WalloBrux ; 3° une réunion de la Wallonie à la France.

« Une Wallonie indépendante serait très rapidement confrontée à une situation à la grecque – pauvre et chancelante. Quant au WalloBrux, ce n’est qu’une chimère, comme l’a fort bien décrit François Perin : nous aurions une Belgique en réduction, aussi médiocre que l’autre, avec les Saxe-Cobourg en prime ! D’une enquête de Rudi Janssens (VUB), en 2013, il ressort d’ailleurs que les Bruxellois ne veulent pas s’engager avec une autre région : 4% seulement d’entre eux seraient prêts à lier leur sort à celui de la Flandre et 4,6% à celui de la Wallonie. Par conséquent, il ne reste logiquement comme meilleure solution qu’une réunion de la Wallonie à la France. (il rit) C’est la France que la Wallonie doit rejoindre et non l’Allemagne, comme l’a un jour suggéré Paul Magnette. Notre langue et notre culture sont communes et elles constituent donc la base idéale pour un tel scénario. Nous avons d’ailleurs été Français durant vingt ans, fin du 18e, début du 19e siècle. »

‘t Pallieterke : Ce schéma est logique et convenable. Mais cadre-t-il bien avec les chiffres, avec la réalité ?

Jules Gheude : « Une scission, par exemple, de la dette de l’Etat, sur base des chiffres macro-économiques de 2010 – ce sont des données incontestables –  et avec un taux d’intérêt de 3,6% pour la dette publique belge, absorberait 22% des dépenses publiques wallonnes.

« Mais la Wallonie serait rapidement confrontée au marché des emprunts internationaux, nécessaires pour financer son déficit. Avec des taux d’intérêt de 12%, comme pour la Grèce, on atteindrait un solde net à financer correspondant à 37% des dépenses publiques. Impossible à digérer, on irait vers un bain de sang social ! Au sein de la France, la dette wallonne (18,6 milliards d’euros) serait marginale. Jacques Attali, l’ancien conseiller du président François Mitterrand, l’a bien compris : le prix à payer pour la France serait sûrement plus faible que ce que cela lui rapporterait. C’est un beau débat. Qu’il commence ! »

‘t Pallieterke : Le parti rattachiste de Paul-Henry Gendebien, le « Rassemblement Wallonie-France », n’a pas obtenu 0,5% des voix en mai 2014. Qui est donc favorable à ce scénario ?

Jules Gheude : « La création de ce parti, en 1999, ne fut pas une bonne idée. François Perin a d’ailleurs tenté vainement de dissuader Paul-Henry Gendebien de concrétiser le projet. Aussi longtemps que la Belgique existera, les Wallons continueront à voter pour les partis traditionnels.

« Mais la situation changerait avec la scission du pays. En 2008, « Le Soir », conjointement avec « La Voix du Nord » à Lille, a réalisé un sondage pour savoir comment les gens envisageaient les choses en cas de disparition de la Belgique. 49% des Wallons voyaient l’avenir de leur région en France. Un sondage Ifop / France-Soir en 2010 a révélé que 66% des Français, et le taux atteignait même 75% dans les régions frontalières, accueilleraient favorablement la réunion de la Wallonie. »

‘t Pallieterke : Pourquoi êtes-vous partisan de cette intégration sur mesure ? Pourquoi pas une assimilation directe ?

Jules Gheude : « Les études que nous avons réalisées pour les Etats généraux de Wallonie de 2009 ont fait apparaître des différences sensibles avec la France : notre système d’enseignement avec le Pacte scolaire, le fait que nos syndicats paient les allocations de chômage. Les mutuelles françaises n’ont rien de comparable avec les nôtres, car en France c’est l’Etat qui est compétent pour le remboursement des soins de santé.

« Nous avons fait alors la connaissance du Français Jacques Lenain, l’un de ces brillants « commis d’Etat » comme la France en compte tant. Il était à la tête des hôpitaux de France et il avait lu un ouvrage de Gendebien. Lenain part du principe que ni le monde politique wallon ni les syndicats ou les mutuelles n’accepteraient une assimilation qui leur ferait perdre leurs prérogatives. Il défend donc une forme d’intégration, l’union-intégration, qui permet de maintenir la spécificité de la Wallonie. Pas besoin, dit-il, que les Wallons se présentent nus devant Marianne pour revêtir ensuite l’uniforme français.

« La Constitution française n’est pas une armure en acier. Elle peut accorder à la Wallonie un statut propre qui lui garantit sa spécificité et son autonomie. En ce qui concerne l’ex-droit fédéral belge, il est conservé, à quelques exceptions près, et placé sous la responsabilité du législateur français. En échange, la France compte sur une gestion wallonne sérieuse et efficace, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui. »

‘t Pallieterke : Un classique, et Bruxelles ?

Jules Gheude : « Une large majorité opte pour une forme d’autonomie. Un district européen, comme l’envisageait Louis Tobback, n’est pas une option réaliste. On ne voit pas, en effet, se profiler une forme d’Etats-Unis d’Europe. Les 28 Etats membres n’y sont pas prêts.

« Je vois plutôt Bruxelles évoluer comme une Cité-Etat, abritant le siège des institutions européennes, de l’OTAN et de nombreuses organisations et entreprises internationales. Ce scénario s’écarte de Washington DC. Tous les habitants pourraient ici prendre part aux élections pour constituer la représentation parlementaire. »

‘t Pallieterke : Avez-vous des craintes en voyant la N-VA être la plus grand parti de Belgique, avec comme but de supprimer le pays ?

Jules Gheude : « La N-VA a du talent pour gérer la Flandre et le pays. Au sein du gouvernement flamand, le ministre Philippe Muyters est parvenu, cinq années de suite, à maintenir le budget hors du rouge. En Wallonie, c’est impossible. On reporte systématiquement le retour à l’équilibre.

« Le Mouvement flamand craint une « belgicisation » du parti nationaliste. Je crois que Bart De Wever est trop perspicace et trop habile pour cela. Il a souligné que la position actuelle, avec un arrêt communautaire, était provisoire. Dans cinq ans, le parti retrouvera sa liberté communautaire.

« Dès que la dette de l’Etat aura diminué – l’une des priorités de la coalition suédoise -, la question de la structure de l’Etat sera de nouveau abordée. De Wever sait que le démantèlement de la Belgique est irréversible. La Wallonie, Bruxelles et la Flandre ont donc tout intérêt à ce qu’aucun moment de la scission, la dette publique soit la plus petite possible. »

‘t Pallieterke : Sur le plan pratique, comment voyez-vous la concrétisation de ce réunionisme ?

Jules Gheude : « Je suis un démocrate. Les Français et les Wallons devront donc décider par référendums, l’un ici, l’autre en France. Comme je l’ai déjà dit, une majorité est prête en France  à accueillir les Wallons. Mais la question demeure : dans quelles conditions ? Un statut de large autonomie pourrait en effet rendre d’autres régions de France jalouses. »

‘t Pallieterke : Vous dites que, dans la pensée wallonne, le réunionisme a toujours été une constante ?

Jules Gheude : « Paul-Henry Gendebien a été, durant plusieurs années, Délégué général de la Communauté française à Paris. Dans l’un de ses livres, il explique qu’il a eu l’occasion de recevoir le Liégeois Jean Gol, qui constatait que même les libéraux flamands étaient devenus nationalistes.

« Lorsque Léo Tindemans torpilla en 1978 le Pacte d’Egmont, François Perin tenta de réunir la « famille » libérale autour d’un projet communautaire commun. Mais il se heurta à l’intransigeance des libéraux flamands, notamment Herman Vanderpoorten. Gol était convaincu que la Belgique n’avait plus d’avenir et que la France était l’unique solution pour la Wallonie. Sur un sous-bock, raconte Gendebien, il se mit à compter le nombre de parlementaires wallons qui siègeraient à l’Assemblée nationale. Les deux hommes évoquèrent aussi les scénarios possibles, en particulier celui de l’Alsace-Lorraine.

« Le lendemain de cette rencontre, Gol eut des contacts au plus haut niveau avec des cercles politiques parisiens. Je rappelle aussi qu’après la Seconde Guerre Mondiale, un Congrès wallon s’est prononcé pour le réunionisme, avant d’approuver l’option fédérale. Aujourd’hui, vous trouverez des réunionistes au sein de tous les partis wallons. »

« La N-VA est un partenaire gouvernemental loyal »

On s’attendait à des tensions entre la N-VA et le MR. Le gouvernement Michel est principalement confronté aux bisbilles entre la N-VA et le CD&V. Quel est votre sentiment à cet égard ?

« La N-VA est un partenaire loyal, mais son objectif demeure l’indépendance de la Flandre. Siegfried Bracke l’a rappelé récemment : cette indépendance est une évolution logique, tout comme les lois de Darwin. La N-VA ne bazardera pas ses objectifs et le CD&V réagit comme un concurrent électoral de la N-VA.

« Je pense au Pacte d’Egmont en 1978, lorsque la Volksunie et le FDF étaient ensemble dans le gouvernement Tindemans. Le démocrate-chrétien Léo Tindemans est allé remettre sa démission au roi, renvoyant ainsi, nus devant leurs électeurs, la VU et le FDF qui s’étaient entendus au départ de concessions réciproques.

« Ce ne sera pas le cas aujourd’hui. Le CD&V ne peut pas refaire ce show en pointant du doigt le concurrent comme parjure. Les deux partis ont, en effet, clairement dit qu’ils voulaient la paix communautaire durant cinq ans.

« Le CD&V joue aujourd’hui le rôle du PS, selon la presse francophone. Ce faisant, il nage à contre-courant de la Flandre. La prospérité de la Flandre n’est pas le fait d’une politique de gauche, mais bien d’une vision de droite qui a donné ses chances aux petites et moyennes entreprises, lesquelles constituent plus que jamais l’épine dorsale de l’économie flamande.

« Si le gouvernement Michel devait chuter avant son terme de cinq ans, la N-VA reprendrait ses billes et nous irions sans doute encore plus vite vers le confédéralisme.

« En 1962, après la fixation de la frontière linguistique, François Perin écrivit que la Flandre était devenue un Etat dans l’Etat. Cette phrase montre sa clairvoyance : Si aucune révision constitutionnelle n’intervient à temps, l’éclatement du pays pourrait se solder par des institutions centrales très simples : des délégués des gouvernements wallon, flamand et bruxellois se concertent d’une manière régulière au sein d’un conseil fédéral et passent des conventions entre Etats pour la gestion d’intérêts communs. (…) Les trois parties gardent la plénitude de leur souveraineté : seules des conventions entre voisins régleraient les problèmes auxquels ils seraient inévitablement confrontés. C’est une formule de confédération centrifuge. »

5 réflexions sur « Cette semaine dans ‘t Pallieterke »

  1. Très intéressant cet article. Tout comme la vidéo de M. Jules Gheude sur Télévesdre où il parle de M. François Perin. Sinon, j’avais une question: je ne connaissais pas le terme « Alsace-Moselle » mais bien « Alsace-Lorraine »! Est-ce la même chose et le terme « Alsace-Lorraine » n’est-il pas le plus correct???

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  2. Cher Monsieur Samuel,

    On parle d’Alsace-Moselle parce que cela correspond aujourd’hui à l’ancien territoire qui fut annexé par la Prusse en 1871, et c’est dans cette zone que restent encore aujourd’hui en vigueur certaines législations bismarckiennes. En effet, la Lorraine ne fut pas totalement annexée par l’Empire allemand, mais seulement une partie de celle-ci : c’est ainsi que le département de la Meurthe a perdu certains arrondissements au profit de la Prusse, ainsi que celui de la Moselle, et que les arrondissements restés français ont constitué le nouveau département de Meurthe-et-Moselle. Lors du retour de ces territoires à la France, ils ont été réintégrés dans le département de la Moselle, pour partie, et dans le département de Meurthe-et -Moselle – qui a subsisté- pour une autre partie.

    « Alasce-Lorraine » est donc un résumé approximatif de la réalité, puisque la totalité de la Lorraine n’avait pas été annexée par la Prusse. Si on veut être précis, on parlera donc d’ « Alsace-Moselle ».

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    1. Ah ok. Merci bien pour cet éclaircissement! Je suis frontalier avec la Lorraine et je ne connaissais pas cet aspect précisément. J’ai toujours cru que seule l’Alsace (Bas-Rhin, Haut-Rhin) avait été rendue à la France, mais je savais pas qu’il y avait une partie de la Moselle également! Il y a encore le département de la Meuse dans la Lorraine qui n’était pas annexé par la Prusse alors, mais plutôt seulement une partie de la Moselle. C’est pour ça donc qu’il vaut mieux dire « Alsace-Moselle » que « Alsace-Lorraine » (historiquement parlant), si j’vous ai bien compris. Merci.

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  3. Bien évidemment, on ne peut préjuger de rien. Toutefois, si les Flamands semblent s’intéresser de plus en plus aux idées des réunionistes wallons, il faut peut-être se dire qu’ils pourraient en tirer un certain intérêt pour leur propre combat. Un hirondelle ne fait pas le printemps mais laisse présager son arrivée…

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  4. Je me demande, quant à moi, si la normalisation de la N-VA n’est pas déjà accomplie. En effet, ce parti est devenu – comme la plupart des autres formations flamandes – schizophrène : le ministre de l’Intérieur et le président de la Chambre qui participent à la Vlaams Nationaal Zangfeest pour y chanter leur haine d’un Etat qu’ils sont censés représenter et protéger, c’est du jamais vu ! Dès lors, je ne sais si « l’intelligence » de Bart De Wever penche en faveur de tel ou tel scénario, mais il est certain qu’en jouant sur les deux tableaux, son parti a cessé de se singulariser, pour devenir une espèce de deuxième CD&V (lequel est également confédéraliste).

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