Valmy, parfait bilingue français-néerlandais, attire notre attention sur les deux articles suivants :
Sortie du nucléaire en 2025: la question n’est plus « si », mais « comment ». Journal De Standaard.
15 décembre 2017 | Auteur : Bart Sturtewagen | Traducteur : Herve Voglaire Sanchez
Alors que les quatre ministres, régionaux et fédéral, de l’Energie sont parvenus à se mettre d’accord en début de semaine pour signer un pacte énergétique prévoyant, notamment, la fermeture des dernières centrales nucléaires du pays en 2025, la N-VA a fait savoir qu’elle ne donnerait pas son feu vert, ni au niveau fédéral ni au niveau flamand.
Dans son communiqué, le premier ministre fédéral Charles Michel a adopté un ton acéré dont il n’est d’ordinaire pas coutumier. « Je ne laisserai personne torpiller le pacte énergétique », a-t-il assuré. Avant de poursuivre en évoquant une « exécution loyale de la loi » et la « bonne foi ». Autant de termes qui laissent peu d’espace aux négociations ou à une retraite honorable. Depuis que la N-VA a intégré le gouvernement, jamais elle n’avait à ce jour été mise aussi ouvertement sous pression par le premier ministre.
Tous les partis au pouvoir, tant sur le plan régional que national, sont concernés par le pacte énergétique interfédéral, qui prévoit à nouveau la fermeture des dernières centrales nucléaires à l’horizon 2025. La N-VA, de son côté, n’est pas convaincue que la production d’énergie fiable et abordable sera suffisante d’ici là si les deux dernières centrales venaient à baisser le rideau.
Si l’on se fie au passé, tout plaidoyer en faveur d’un délai supplémentaire s’avère insoutenable. Les premières décisions quant à la fin de l’ère nucléaire remontent à près de 15 ans en arrière, à l’époque du gouvernement violet-vert de Guy Verhofstadt. L’histoire nous apprend qu’il y a toujours une bonne raison d’attendre et que, avant que l’on ne s’en aperçoive, le délai fixé apparaît tout d’un coup intenable. S’ensuit alors systématiquement un énième report et une dynamique essoufflée. Voilà pourquoi il est urgent, à présent, de mettre les mains dans le cambouis. Ce n’est que sous la contrainte qu’une mission extrêmement difficile peut être menée à bien.
La N-VA rétorque qu’il est néanmoins insensé de suivre aveuglément la loi si celle-ci nous mène droit dans le mur. Les importants groupes de pression issus de l’industrie, tels que la FEB, sont sur la même longueur d’onde. Cette position a le mérite d’obliger les partisans du pacte énergétique à chiffrer la manière dont l’objectif ambitieux sera atteint. Le plus simple, en effet, consiste à signer un plan et d’en confier la mise en œuvre au gouvernement suivant, voire à la prochaine génération politique.
La politique de la montagne russe menée jusqu’à présent sape le dossier énergétique dans son ensemble. Ce sempiternel manège doit cesser. Et persuader la population que tout finira par s’arranger si chacun y met du sien, ce n’est pas sérieux. Il faut maintenant impérativement mettre les chiffres et les modèles qui démontrent la faisabilité du projet ainsi que les efforts nécessaires à sa réussite sur la table. Assez palabré.
En définitive, il est hors de question de laisser tomber l’objectif fixé en matière de sortie du nucléaire d’ici 2025. Cela fait bien longtemps que la question n’est plus « si », mais « comment ». Face à l’inéluctable, il est vain de jouer les prolongations.
La fermeture des centrales nucléaires coûtera minimum 30 milliards. Journal De Morgen.
2 janvier 2018 | Auteur : Jeroen Van Horenbeek | Traducteur : Fabrice Claes
La fermeture de cinq centrales nucléaires suisses coûtera 20 milliards d’euros. La facture de la fermeture des centrales belges risque de se chiffrer à un montant nettement supérieur. Mais qui la paiera ?
Fermer une centrale nucléaire, c’est facile en apparence. Mais dans la pratique, ça l’est beaucoup moins. La déconnexion d’une centrale du réseau électrique ne constitue qu’une première étape sur une route très longue. Une fois que la centrale est à l’arrêt, nous pouvons retirer le combustible nucléaire hautement radioactif du réacteur et le stocker pendant plusieurs décennies, d’abord dans une piscine nucléaire, puis dans un container sur le site même. Et finalement, nous pourrons nous débarrasser du combustible dans une décharge nucléaire.
Le combustible, c’est une chose, mais les centrales en sont une autre. Un réacteur mis à l’arrêt, c’est comme un énorme hall rempli de tuyaux et de matériel éventuellement contaminés par des éléments radioactifs. Il faut donc tout contrôler et traiter avec le plus grand soin. D’après les experts, le démantèlement d’une centrale nucléaire dure plus de quinze ans. La fermeture d’une centrale et l’élimination des déchets nucléaires constituent des tâches herculéennes. Qui coûtent un certain prix.
En Suisse, on discute depuis des années de la fermeture de cinq centrales nucléaires (puissance totale : 3 200 mégawatts). Une nouvelle étude, menée à la demande de l’État helvétique, évalue le prix du démantèlement total à 20 milliards d’euros à l’heure actuelle. Avant de réaliser cette étude, les Suisses ont analysé le coût de la fermeture de réacteurs de pays étrangers, et l’addition est nettement plus salée que prévu.
Une tirelire pas assez remplie
La facture suisse pose donc aussi question sur la sortie du nucléaire en Belgique. La loi prévoit la fermeture de sept centrales nucléaires à Doel et à Tihange (puissance : 6 000 mégawatts) d’ici 2025. Pourtant, notre pays n’a procédé à aucune évaluation du coût de cette fermeture, et ce, tout simplement parce que le politique n’a pas encore décidé de la manière dont il entend stocker les déchets. Probablement dans le sol de la Campine, mais personne n’ose trancher.
Dans l’attente d’une décision, les exploitants des centrales nucléaires, à savoir Engie-Electrabel et dans une moindre mesure EDF Luminus, sont contraints, chaque année, de remplir une tirelire en vue du nettoyage à venir. Celle-ci contient à l’heure actuelle 10,1 milliards d’euros. La question est donc de savoir si la tirelire sera suffisamment remplie lors de la fermeture des centrales en 2025.
Les Suisses, dans leur étude, évaluent le coût à 6,2 millions d’euros par mégawatt. Étant donné que la plupart des réacteurs belges sont du même type que les réacteurs suisses, qu’ils ont le même âge et que les deux pays envisagent un stockage souterrain des déchets, il semble sage d’utiliser les mêmes prévisions que les Suisses. Par conséquent, la Belgique, avec ses 6 000 mégawatts, devra débourser quelque 37 milliards d’euros.
Par ailleurs, pour plusieurs sources proches du dossier nucléaire, une somme de 30 milliards d’euros ou plus serait « plausible ». S’il est bien trop délicat pour ces sources d’évoquer publiquement une telle somme, Eloi Glorieux, de Greenpeace, n’a aucun mal à s’exprimer sur le sujet : « Je prévois depuis des années que le coût du démantèlement des centrales nucléaires ne sera pas couvert par la tirelire que remplissent Engie-Electrabel et EDF Luminus. Il faut beaucoup plus d’argent. »
Glorieux craint qu’en définitive, ce soit le contribuable qui règle la différence. « Dans les années 80, c’était déjà le contribuable qui avait dû payer pour la démolition de l’usine de traitement de combustibles irradiés Eurochemic à Dessel. Et il en ira de même pour les centrales nucléaires. Les producteurs d’énergie tentent par tous les moyens d’échapper au pouvoir politique. En Allemagne, par exemple, les fournisseurs d’énergie E.ON et RWE ont l’intention d’isoler leurs activités nucléaires dans une bad bank qui pourra tomber en faillite, de manière à ce qu’ils n’aient plus à payer pour le nettoyage. »
Electrabel seule
Le gouvernement allemand a empêché cette pratique. En Belgique, la question n’est pas à l’ordre du jour, mais pour combien de temps ? Le groupe français Engie envisage notamment une isolation de sa filiale belge Electrabel. Dans ce cas, l’énorme héritage du nucléaire reviendrait à Electrabel seule. La société sera-t-elle alors à même d’assumer ses responsabilités financières ? Dans la négative, l’argent devra venir d’une autre source. En d’autres termes : de l’État, c’est-à-dire du contribuable.
La ministre fédérale de l’Énergie Marie Christine Marghem (MR) promet de « se pencher sur l’étude suisse » et se refuse à tout autre commentaire. Pour Engie-Electrabel, il est difficile d’appliquer le mode de calcul suisse à la Belgique. « Quoi qu’il en soit, la loi est claire : Engie-Electrabel paiera pour le démantèlement des centrales nucléaires, assure Anne-Sophie Hugé, la porte-parole de la société. Nous respectons cette obligation, et nous continuerons de le faire. »
Comment sortir du nucléaire? Mais en construisant une nouvelle centrale, pardi (Le Soir en ligne, ce jeudi). Depuis les acrobaties verbales de Michel Ier (?) pour qualifier les propos de Francken dans l’Affaire soudanaise, on sait aussi que « ne pas dire la vérité » n’est pas « mentir »…
L’expertise surréaliste belgo-belge en quelque sorte, celle d’un état plus virtuel que réel, qui détricote la réalité sensible…sans se rendre compte qu’il entre ainsi dans la 3e dimension!
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