Mais que veut Di Rupo ?

« Elio Di Rupo a expliqué que le cours de l’histoire allait vers le sens d’une réduction du temps de travail avec maintien du salaire », pouvait-on lire hier dans la presse et cela donnait l’impression que le PS promettait une réduction généralisée de 20 % du temps de travail sans aucune perte de revenu. Presqu’aussi bien que le PTB qui, en avril 2015, réclamait la semaine de 30 heures pour tous avec maintien du salaire. Et voilà que ce matin, Laurette Onkelinx confirmait sur la Première que le partage du temps de travail était le nouveau cheval de bataille du PS.

Le cdH, qui gère la région Wallonie avec le PS, a aussitôt pris ses distances avec une proposition qui lui fait l’effet d’une « illusion ». Un parti au pouvoir devrait se méfier des effets d’annonce, il faut être en mesure de joindre le geste à la parole. En l’occurrence, on demande à voir ce que le PS fera concrètement pour mieux partager le temps de travail en préservant le pouvoir d’achat des travailleurs. Reste que le thème est forcément dans l’air.

En avril, Ecolo a déjà proposé « de rendre possible, pour les entreprises qui le souhaitent, le passage à la semaine des 4 jours/32h, avec embauche compensatoire, maintien du salaire pour les salaires bas et moyens et une aide financière aux entreprises pour prendre en charge les surcoûts liés à ce passage aux 32 heures ». En janvier, Didier Gossuin, Ministre bruxellois en charge de l’Emploi et de l’Économie, figure bien connue du parti Défi, annonçait son intention d’expérimenter la semaine de quatre jours pour des emplois non qualifiés. Comme le site du PTB, il faisait référence aux réflexions de l’économiste français Pierre Larrouturou qui, avec Michel Rocard, a signé en 2013 un livre intitulé La gauche n’a plus droit à l’erreur.

Le constat ne souffre aucune discussion : « Alors qu’il a fallu 140 ans pour que la productivité soit multipliée par deux entre 1820 et 1960, elle a depuis été́ multipliée par cinq ». En soi, ce n’est pas un problème, sauf que l’évolution de la technologie risque de rendre « inutilisable » et même « inutile » une partie de plus en plus grande de la population. Il appartient certainement aux pouvoirs publics de se préoccuper de cette question, l’Etat pouvant contribuer à la redistribution du travail autant qu’à la redistribution des revenus.

On peut néanmoins avoir un doute quand Elio Di Rupo avance que « le cours de l’histoire va vers le sens d’une réduction du temps de travail avec maintien du salaire ».

Il n’est pas du tout certain qu’un tel « sens de l’histoire » soit compatible avec un monde ouvert régi, presqu’exclusivement, par les lois de la concurrence. Or, la tendance est au libre-échange. On doit s’attendre à ce que la démocratie soit de plus en plus identifiée à l’économie de marché, ce qui renverrait à la marge la moindre action des pouvoirs publics. Le rapide avènement d’un marché global libéré par l’internet nous ferait penser qu’au XXIe siècle, les frontières, les états-nations, et même les états tout court, sont devenus proprement insupportables. Si le PS n’est pas d’accord avec cette évolution qui, à bien des points de vue, le condamne, il doit le faire savoir et agir en conséquence.

Ce qui est certain, c’est que, sur cette question, comme sur d’autres, la Flandre est très éloignée des positions affichées par le PS. Elio Di Rupo, qui manifeste volontiers son amour de la Belgique, et qui ne s’est jamais senti aussi bien qu’au 16 rue de la Loi, devrait avoir l’honnêteté de le reconnaître : on ne peut maintenir la Belgique qu’en s’alignant sur les positions flamandes. Or, le discours politique, en Wallonie, est davantage inspiré par la France, et c’est en France qu’il pourrait le mieux s’exprimer. Cherchez l’erreur.

On l’a constaté avec le rejet actuel du TTIP et même du CETA par les autorités wallonnes : une telle attitude est de nature à faire hurler la Flandre. Heureusement pour tous ceux qui n’ont pas épargné leurs critiques à l’égard de ces traités de libre-échange encore en discussion, la France garde un certain poids politique et sa façon de voir n’est pas éloignée de celle qui domine en Wallonie. (G.R.)

Voici une présentation critique du TTIP  :

4 réflexions sur « Mais que veut Di Rupo ? »

  1. Etant au chômage et ayant un mal fou à retrouver (à bientôt 44 ans…), si ça peut relancer la machine et offrir plus d’emploi à ceux qui n’en ont pas…
    Mais, personnellement, si la proposition Ecolo semble attrayante, je préfèrerais une semaine à 5 jours (7 heures/jour) = 35 heures, le dimanche où personne ne travaille (jour de repos, en famille) et le samedi libre à chacun d’y aller ou pas (ou pouvoir choisir 1, 2, 3 ou 4 samedi/mois au choix de l’employé ou suivant les besoins de l’employeur).

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  2.  » Le constat ne souffre aucune discussion : l’évolution de la technologie rend « inutilisable » et même « inutile » une partie de plus en plus grande de la population. » et,  » s’ il appartient certainement aux pouvoirs publics de se préoccuper de cette question, l’Etat, pouvant contribuer à la redistribution du travail autant qu’à la redistribution des revenus, ne s’est jamais vraiment préoccupé (ni la Droite ni la Gauche) de la problématique du travailleur et de la travailleuse sans qualification. Dans les années cinquante, ces personnes, dénommées « manœuvres », trouvaient de l’emploi et de la dignité. Aujourd’hui, soit elles sont camouflées sous des dénominations bizarres soit elles sont évacuées du système comme des malpropres dérangeantes. Or, qu’on le veuille ou non, sur Terre seul le travail apporte une raison de vivre. Il suffit d’observer ce qui se passe au Mexique, en Amérique Centrale, en Amérique Latine, en Afrique, pour se rendre compte de ce qu’apporte des sociétés qui rejettent des tranches entières de population dans le dénuement. Mais, par contre, ces pays permettent à quelques « happy few » de réaliser d’énormes gains dans des affaires autant illégales que maffieuses.
    Les politiciens belges et européens rêvent-ils de tomber si bas ?

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  3. http://www.rtbf.be/info/belgique/detail_l-allocation-familiale-en-region-wallonne-sera-de-120-a-160-euros-par-mois-prevot?id=9394911 (source RTBF)

    Et voilà, encore une différence que vous soyez au Nord ou bien au Sud de la frontière (linguistique)!!! Déjà que nous, wallons, payons encore une taxe TV (les flamands plus depuis belle lurette) et voilà qu’un ménage flamand touchera plus d’allocations familiales qu’un ménage wallon! Et ils osent encore appeler ça un pays!!!!!! Mais qu’ils arrêtent là, m….!!!! Ca me fâche là!!!!!!!!

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    1. Patience ! La Wallonie ne pourra pas tenir la course. Les politiciens ne l’ignorent pas mais le bon peuple, en « Belgique du Sud », ne le ressent pas encore malgré les fermetures d’usines. La prochaine offensive de la NVA portera sur la sécurité sociale et je parie qu’ elle agira de sorte que Bruxelles soit légèrement avantagée afin que cette Région « sœur », enclavée dans le Vlaams Brabant, courtise Mère Flandre.

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