Quand le fédéralisme était une utopie

Kroll, confédéralismeMalgré les efforts sincères et honnêtes d’hommes politiques tant flamands que wallons et bruxellois, le passage de la Belgique unitaire à la Belgique fédérale aura été une suite de compromis laborieux plus proches souvent de compromissions qui ne pouvaient déboucher que sur l’échec que nous connaissons aujourd’hui. La cause en est simple : côté flamand, mu par un ADN nationaliste, le fédéralisme n’était qu’une fusée à étages multiples qui devait conduire la Flandre à l’autonomie, dernière étape vers l’indépendance. Côté wallon, c’était une finalité qui permette à une « Belgique nouvelle » de trouver un équilibre qui soit bénéfique à chaque communauté et région.

Lorsque les partis nationaux se sont scindés l’un après l’autre pour devenir des partis responsables devant leur seule communauté, la messe était dite. L’implosion de la Volksunie qui a produit un essaimage nationaliste flamand dans tous les partis du nord a été un autre événement majeur. Le retour à une circonscription nationale où des élus de chaque région et/ou communauté seraient responsables devant l’ensemble des Belges est une chimère, une illusion, un mirage parce que l’immense majorité des Flamands n’en veut pas. 

Là, nous toucherons à tous les aspects de la sécurité sociale et la population wallonne percevra toute la perversité d’un Etat belge à domination flamande dont la première préoccupation sera tout sauf le sort de la Région wallonne. M. Di Rupo sera-t-il encore là pour énoncer le slogan qui l’avait porté au pouvoir : « mon parti, c’est mon pays » ! Tout comme pour le sort de ses citoyens exclus du chômage, il n’aura plus que ses yeux pour pleurer et la prise d’anxiolytique pour assurer ses nuits de sommeil.

Ce qui me chagrine est de constater que le monde décisionnel wallon reste imperturbablement muet devant un scénario écrit d’avance pour tout citoyen qui s’intéresse un tant soit peu à l’évolution de ce pays. Comment est-il possible qu’une seule voix se fasse entendre : « nous croyons au fédéralisme d’union » !

Les médias belges de langue française, malgré certains éclairs de lucidité, portent dans cet état de chose une grande responsabilité. Mais existe-t-il encore un média qui porte la voix de la Wallonie ?

Paul D.

11/04/15 à 08:55 – Mise à jour à 16:00

Source : Le Vif/l’express

François PerinPlusieurs écrits de François Perin, l’un des artisans de la transformation de la Belgique en un pays fédéral, sont réédités. L’occasion de redécouvrir cette figure majeure du mouvement wallon, dont les idées ont inspiré les fondateurs d’Ecolo.

Une démission-désertion, du dépit, et même un soupçon de dégoût. Le 11 juin 1985, François Perin claque la porte du Parti réformateur libéral et met un terme à sa carrière politique. L’intellectuel liégeois justifie son acte en déclarant ne plus pouvoir « cautionner la politique conservatrice » menée par la coalition Martens-Gol, qui rassemble sociaux-chrétiens et libéraux. L’ancien ministre reproche à son président de parti, Louis Michel, de s’éloigner du libéralisme des Lumières pour lorgner la droite dure, incarnée au Royaume-Uni par Margaret Thatcher. Mais la motivation profonde de sa décision réside ailleurs : esprit caustique, inclassable, Perin éprouve le besoin de recouvrer une totale liberté de pensée.

Son geste de 1985 est, à vrai dire, le prolongement d’un autre, survenu cinq ans plus tôt. Le 26 mars 1980, François Perin démissionne, à la surprise générale, de son mandat de sénateur. En plein débat sur la création des premiers gouvernements régionaux, il laisse apparaître l’énorme scepticisme que lui inspire l’avenir du pays. « Je ne parviens plus, en conscience, à croire en l’avenir de notre Etat, lâche-t-il. Il est difficile de rester parlementaire d’un Etat auquel on ne croit plus et dont le système politique paraît absurde. » Au cours de sa brève allocution, le sénateur expose les trois maux, « incurables et irréversibles », dont souffre selon lui la Belgique : le nationalisme flamand, la particratie et le pouvoir exorbitant des syndicats.

La Belgique, François Perin ne l’a jamais beaucoup aimée. En revanche, il a longtemps cru que le fédéralisme serait à même de donner au pays un nouveau souffle, une nouvelle cohérence. Cet espoir déçu le fera basculer vers un rejet total de l’introuvable patrie belge, comme l’illustre un florilège de ses écrits, aujourd’hui réédités et commentés par l’essayiste Jules Gheude. « J’ai cru qu’une réforme institutionnelle de type fédéral serait de nature à garantir la cohabitation paisible des deux grandes communautés du pays et je me suis investi politiquement dans ce sens, confessera Perin en juin 2013, trois mois avant sa mort. Mais j’ai compris très vite que le fédéralisme, que nous considérions, nous les francophones, comme un aboutissement, n’était pour les Flamands qu’un moyen de progresser plus vite sur la voie de l’indépendance. »

Ecolo et le fédéralisme radical

De 1974 à 1976, Perin intègre le gouvernement Tindemans II, où il obtient le portefeuille des Réformes institutionnelles. Peu après, il se rapproche des libéraux. A la même époque, un bouillonnement nouveau gagne les sociétés européennes. Un peu partout, et notamment en Wallonie, les pionniers de l’écologie politique s’organisent. Cette préhistoire du parti Ecolo est racontée par Benoît Lechat, ancien journaliste à l’agence Belga, dans un livre publié en janvier dernier, quelques semaines avant son décès. L’un des grands mérites de l’ouvrage est de montrer à quel point les écologistes wallons ont été imprégnés par les thèses fédéralistes.

Le père fondateur d’Ecolo, Paul Lannoye, a lui-même été l’un des dirigeants du Rassemblement wallon. Ce physicien namurois, assistant à l’ULB, partage avec François Perin l’idée que la particratie gangrène la Wallonie et que la région a besoin d’un sursaut. Même si les deux hommes se sont distanciés au début des années 1970, leur diagnostic reste identique. « Nous prenons conscience que le combat est d’abord un combat contre nous-mêmes, professe Perin. En Wallonie, que de conservatisme de tout bord, que de bornés et d’aveugles, que de sclérose et de vieillissement ! D’une certaine façon, nous devons être reconnaissants à l’égard des Flamands tentés par l’égoïsme et le goût de l’hégémonie de nous faire sortir de notre inertie ! »

Ironie de l’Histoire : c’est à peu près au moment où François Perin quitte la politique que le parti se rallie à des positions plus conventionnelles, ou plus réalistes, et délaisse le fédéralisme radical de ses débuts. La fin d’une utopie.

4 réflexions sur « Quand le fédéralisme était une utopie »

  1. Excellente analyse sur la naufrage de la Wallonie en Belgie. L’Histoire se momtrera sévère
    envers Di Rupo et ses complices véritables lécheurs de bottes de la Flandre. Guy Spitaels
    comme Francois Perin lá ou ils sont doivent les regarder avec mépris, Et tout Wallon devrait
    méditer les paroles de Jean Gol La Wallomie souffre ils rient QUI Les Flamands ceux qui
    dans les stades parlent des Cacas wallons tandis que nombre de Wallons masos parlent
    de leurs amis flamands amis ? non Ennemis implacables

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  2. Et quand on voit ce qu’ils font dans le sport où tout ou presque est régionalisé et maintenant, les clubs du Cercle de Bruges et du Lierse qui veulent remettre en cause la licence D1 obtenue par le club de Mouscron et tout ça, appuyé par la Pro League (à 3/4 flamande)!!! Qu’ils ouvrent les yeux, bon sang!!! On continue à payer la redevance télé alors que la Flandre ne la paie plus depuis belle lurette, et on ose encore trouver ça normal, dans un même pays, pour des soi-disant même citoyen (belges). Imaginez un marseillais ou un lyonnais qui paierait une taxe dont le parisien serait exonéré! Impensable!!!

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    1. Tout à fait d’accord. Il existerait déjà une avancée symbolique si la RTBF, largement dépendante de l’argent wallon, était OBLIGEE de parler de la Wallonie et de Bruxelles et non plus du « sud du pays » et de la « capitale ». Qui donc s’énerve lorsque le Président de la Flandre demande le respect de la « constitution belge » par la suppression du terme « Wallonie-Bruxelles » ? Ce jour là, toutes les autres radios se mettront au diapason même la privée RTL. Et nous aurons avancé dans le bon sens.

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  3. « Mon parti, c’est mon pays ». Ce slogan, si mon souvenir est toujours exact, fut créé par un homme politique de Flandre, le dernier président « national » du PLP-PVV, Omer Vanaudenhove. Di Rupo n’a jamais rien inventé; il n’œuvre que pour lui-même, sa famille et son clan politique !

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